Alerte mondiale : la Grande Barrière de corail fait face à une hécatombe historique

Les chiffres dévoilés mardi par l’Australian Institute of Marine Sciences glacent le sang : jusqu’à 72 % de mortalité corallienne sur les douze récifs étudiés. Une véritable hécatombe provoquée par un cocktail dévastateur. Un blanchissement massif des récifs, le passage de deux cyclones et d’inondations dévastatrices.

Dans certaines sections septentrionales, un tiers des coraux durs ont péri, marquant le « plus important déclin annuel » depuis le début des observations gouvernementales il y a 39 ans. Cette structure vivante monumentale, longue de 2 300 km, pourrait avoir atteint un point de non-retour.

Barrière de Corail
Vue satellite de la côte est du Queensland, Australie, mettant en évidence la Grande Barrière de corail (zone sombre à droite des côtes), le plus grand écosystème corallien au monde. © Capture d’écran / Google Maps

Un été meurtrier pour les coraux

Le mécanisme de destruction est implacable. Sous l’effet des températures élevées provoquées par le réchauffement climatique, les coraux expulsent leurs algues microscopiques symbiotiques, les zooxanthelles. Cette relation est essentielle à la survie du corail. Les zooxanthelles, grâce à la photosynthèse, fournissent au corail une grande partie de l’énergie dont il a besoin. En retour, le corail leur offre un environnement protégé aux algues.

Lorsque l’eau environnante est trop chaude, les zooxanthelles produisent des substances toxiques pour le corail, ce qui l’oblige à les expulser. Si la chaleur persiste, ils blanchissent puis finissent par mourir. Cette année marque le cinquième épisode de blanchissement massif en à peine huit ans.

Mike Emslie, chercheur senior à l’Australian Institute of Marine Science, qualifie l’été austral écoulé comme « l’un des plus sévères » jamais enregistrés, avec des niveaux de stress thermique dépassant tous les records précédents. L’année 2024 sera-t-elle pire que l’année 2023, qui reste, pour le moment, la plus chaude de l’Histoire ?

Les acroporas, sentinelles d’un désastre annoncé

Particulièrement touchés, les Acroporas, aussi appelés coraux corne de cerf, incarnent le paradoxe tragique de cette catastrophe. Ces derniers, connus pour leur croissance rapide, sont aussi les premiers à succomber au blanchissement. Leur mortalité exceptionnelle lors de cet épisode fait office de signal d’alarme gravissime.

Richard Leck, responsable des océans pour WWF-Australie, voit ses « pires craintes confirmées » par ces observations préliminaires. Selon lui, « la Grande Barrière de corail peut se régénérer, mais sa résilience a ses limites ». Le plus inquiétant dans cette histoire ? C’est que la zone étudiée reste « relativement restreinte », laissant présager des pertes similaires sur l’ensemble du récif lorsque le rapport complet sera publié l’année prochaine.

L’urgence d’une réponse politique

Cette catastrophe écologique pointe directement vers la responsabilité australienne. Premier exportateur mondial de gaz et de charbon, le pays n’a que récemment fixé des objectifs de neutralité carbone. Le pays a longtemps été un fervent défenseur des énergies fossiles, bénéficiant de subventions importantes pour ces industries. Ces subventions ont ainsi créé une très forte dépendance économique et ont freiné la transition énergétique nationale.

De plus, l’industrie minière représente une part importante de l’économie australienne et génère énormément d’emplois. La transition vers une économie moins dépendante des énergies fossiles se heurte à une certaine frilosité des décideurs politiques, fortement influencés par le lobbying minier. Naturellement, ce dernier défend bec et ongles son secteur et s’oppose à la mise en place de réglementations environnementales plus strictes.

Les défenseurs de l’environnement appellent donc à un engagement plus accentué : une réduction des émissions d’au moins 90 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2035, couplée à un abandon progressif des énergies fossiles.

Même si elle est loin de nous, la disparition de la Grande Barrière sèmerait un véritable chaos écologique. En plus de la perte de la biodiversité marine qu’elle abrite, ces récifs jouent un rôle essentiel dans la protection des côtes en amortissant la force des vagues. Sans cette barrière naturelle, les côtes seraient ainsi plus vulnérables à l’érosion, aux inondations et aux dommages causés par les tempêtes. En tant qu’écosystème complexe, sa disparition entraînerait des conséquences en chaîne sur l’ensemble de la chaîne alimentaire marine. Cette barrière est aussi l’un des poumons de notre planète, puisqu’elle absorbe chaque année des millions de tonnes de CO2 ; sans elle, les effets du réchauffement climatique s’accéléreraient. Un phénomène dont on se passerait volontiers.

  • Jusqu’à 72 % de mortalité corallienne a été constatée sur certains récifs de la Grande Barrière, en raison de blanchissements massifs et de catastrophes climatiques.
  • Les coraux, particulièrement les Acroporas, subissent des pertes records, révélant les limites de résilience de cet écosystème unique.
  • La responsabilité australienne dans cette catastrophe est pointée du doigt, avec des appels à des actions urgentes contre l’usage trop important des énergies fossiles.

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