6 questions pour tout comprendre des super-applications

Omniprésentes en Asie, les super-applications révolutionnent la façon de consommer et d’interagir en ligne de centaines de millions d’utilisateurs. Mais en quoi consistent vraiment ces plateformes tentaculaires et surtout, pourquoi suscitent-elles autant d’intérêt ? Voici six questions essentielles pour tout comprendre de ce phénomène.

C’est quoi une super-application, au juste ?

Une super-application se définit comme une plateforme tout-en-un, qui propose un ensemble de services censés répondre à quasiment tous les besoins des utilisateurs. Cela inclut le commerce en ligne, les services financiers, le transport et la mobilité, les réseaux sociaux, la livraison de repas, voire même le paiement de facture.

Ainsi, la force d’une super-application réside dans sa capacité à simplifier l’expérience utilisateur tout en créant une fidélité autour de ses services ; le consommateur ne doit pas quitter la plateforme pour réaliser la plupart de ses tâches quotidiennes.

Quels en sont les exemples les plus probants de super-applications ?

Les super-applications les plus emblématiques se trouvent principalement en Asie, où elles dominent les usages numériques. WeChat, en Chine, est considéré comme le modèle par excellence. Développée par Tencent, ce mastodonte dépasse de loin la simple messagerie, comme son nom pourrait le faire croire. Elle permet, entre autres, de payer ses courses, commander un taxi, réserver des billets de train, consulter un médecin en ligne et même gérer des documents administratifs. Son impact est considérable. Avec plus d’1 milliard d’utilisateurs actifs, WeChat a rapporté plus de 16 milliards de dollars à sa maison mère en 2023.

En Asie du Sud-Est, Grab, au départ axée sur le transport, est devenue une super-application proposant des services de livraison, des solutions financières et des assurances. Elle répond aux besoins variés de millions d’utilisateurs dans des pays comme Singapour, la Malaisie et l’Indonésie. Ce type de solution émerge aussi en Inde. Paytm, initialement une plateforme de paiements mobiles, s’est par exemple diversifiée pour inclure des services bancaires, des investissements, et des réservations de voyages. Elle joue désormais un rôle crucial dans l’économie numérique du pays.

Les exemples sont plus beaucoup plus limités en dehors de l’Asie, et c’est encore plus vrai pour le cas de l’Europe.

X, anciennement Twitter, va-t-elle devenir une super-application ?

Elon Musk l’a fait savoir peu de temps après son rachat de Twitter, qu’il a rapidement renommé X Corp : il souhaite, à terme, que le réseau social fasse partie d’un ensemble de services proposés au sein d’une même super-application. D’ailleurs, le milliardaire a déjà cité WeChat comme un exemple à suivre.

Il commence, petit à petit, à déployer des fonctionnalités qui montrent les prémices d’une super-application. Tout d’abord en développant le format vidéo avec du streaming, mais également en permettant aux utilisateurs d’effectuer des appels audio et vidéo. De même, la société a entamé des démarches aux États-Unis pour faciliter les paiements, un pan essentiel des super-applications. La fonction de recherche d’emploi introduite dans le réseau social va, elle aussi, dans ce sens.

Pourquoi faire le choix de la super-application, plutôt que de proposer plusieurs services séparés ?

Il est avant tout question d’avantages stratégiques. Cette approche permet de fidéliser et de retenir les consommateurs, en limitant la nécessité de basculer entre différentes applications pour effectuer des tâches. Ainsi, les super-applications créent un écosystème fermé où chaque service renforce l’autre. Cela offre aussi la possibilité d’exploiter les données de manière centralisée pour personnaliser l’expérience et proposer des offres ciblées. Le tout permettant d’augmenter les revenus de la société.

Côté utilisateur, le principal avantage réside dans la simplicité et l’efficacité. Une super-application réduit l’encombrement des appareils en remplaçant plusieurs applications. Elle offre une expérience fluide, avec des paiements intégrés et une navigation unifiée, rendant chaque interaction plus rapide et intuitive. Ceci est d’autant plus utile dans les régions où l’accès à Internet est limité ou coûteux, car le besoin de télécharger et de gérer différents services simultanément est réduit.

Pourquoi n’y a-t-il pas de super-application en Europe ?

Ce modèle peut aussi poser des défis, notamment en matière de concurrence et de protection des données, deux domaines dans lesquels l’Union européenne exerce un encadrement bien plus poussé que d’autres régions du monde.

Le Digital Markets Act, législation récemment entrée en vigueur qui vise à garantir une concurrence saine sur le Vieux Continent, défend un principe allant directement à l’encontre des super-applications. Ce modèle peut en effet mener à des comportements monopolistiques, puisque ces plateformes deviennent des écosystèmes fermés qui limitent justement la concurrence. Dans ce contexte, les petites entreprises et startups peinent à rivaliser face à des géants capables de capturer une part importante du marché, parfois en pratiquant des politiques de prix agressives ou en rachetant leurs concurrents. Des comportements que l’UE cherchent à réglementer avec véhémence.

Le RGPD risque également de mettre des bâtons dans les roues à toute tentative d’échafauder une super-application. Car leur capacité à analyser et exploiter des données personnelles soulève des questions éthiques, notamment sur le respect de la vie privée ou la manipulation des comportements utilisateurs.

Quels sont les risques de ce modèle ?

Outre les préoccupations liées à l’anti-concurrence et aux données personnelles, les super-applications peuvent créer une dépendance sociale et économique. Les utilisateurs enfermés dans ces écosystèmes deviennent vulnérables aux décisions des entreprises, comme la modification des tarifs ou la restriction d’accès.

Pire encore, elles peuvent même servir d’outils de surveillance, en particulier lorsque les gouvernements y accèdent ou les contrôlent. D’où l’importance d’une régulation adaptée pour protéger la concurrence et garantir la transparence, tout en sécurisant les droits des utilisateurs.

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