Pourquoi le réseau 4G risque d’être coupé dans les campagnes françaises
Depuis quelques années, une bataille silencieuse et acharnée menace l’accès au réseau 4G dans les campagnes françaises. En cause, l’arrivée de Valocîme, nouvel entrant parmi les gestionnaires d’infrastructures. Ce dernier, en acquérant des baux de terrains abritant des pylônes télécoms, met la pression sur les infrastructures de couverture mobile, au risque de causer des coupures de réseau dans les zones rurales.
Une guerre des pylônes en plein cœur des campagnes françaises
En France, l’arrivée de Valocîme a bouleversé l’équilibre dans le secteur des infrastructures télécoms. Ce nouvel acteur, financé par le fonds d’investissement américain KKR, propose des loyers plus élevés aux propriétaires fonciers main n’installe aucun pylône télécom. Ainsi, Valocîme tue la concurrence de gestionnaires d’infrastructures comme Cellnex, TDF ou ATC France. Grâce à cette stratégie, Valocîme obtient les droits de location des terrains occupés par ces pylônes télécoms, ce qui pousse les “towerco” historiques à relocaliser leurs infrastructures pour éviter des conflits juridiques.
Problème : dans les zones rurales, le déplacement de pylônes s’avère particulièrement risqué, puisqu’ils couvrent souvent plusieurs opérateurs de téléphonie mobile à la fois. Lorsqu’un mât doit être démonté ou déplacé, le risque de coupure pour les habitants devient plus important. En effet, une fois le bail racheté par Valocîme, les entreprises comme Cellnex sont obligées de trouver en urgence de nouveaux sites pour y transférer leurs antennes, parfois à leurs frais et dans des délais très serrés. Cette précarité met sous tension les acteurs historiques, confrontés à des dépenses imprévues et à une gestion de plus en plus complexe de la couverture dans les zones les plus reculées du territoire.
Depuis le début de l’année, les litiges se multiplient entre les “towerco” et Valocîme, qui ne cesse de réclamer des expulsions de pylônes. Une situation dénoncée par les responsables de Cellnex, dont le président Thomas Bertrand a souligné les dangers de cette instabilité. « Dans certaines zones rurales, nous couvrons les signaux de tous les opérateurs sur un seul mât, explique-t-il au Figaro. Sans certains pylônes, il n’y a plus de couverture mobile du tout dans la zone, impactant gravement le quotidien des habitants. »
Le cas récent de Vaison-la-Romaine illustre cette « guerre des pylônes » à laquelle les riverains assistent parfois impuissants. Dans cette petite ville du Vaucluse, Cellnex a dû déplacer un de ses pylônes de deux kilomètres pour répondre à la résiliation d’un bail par Valocîme. Cette opération, réalisée par hélicoptère, a coûté environ 100 000 euros.
La stratégie de Valocîme, qualifiée de « piraterie » et de « parasitisme » par ses détracteurs, consiste à récupérer des baux en fin de contrat pour demander l’expulsion des “towerco”. Pour Valocîme, ces méthodes sont légitimes, car elles offrent des loyers plus avantageux aux propriétaires fonciers et contribuent à dynamiser un secteur dominé par quelques acteurs. Frédéric Zimer, président de Valocîme, affirme que l’entreprise a remporté plus de 2 600 baux en 2023, ce qui souligne la légitimité de ses pratiques.
En revanche, pour les “towerco”, cette multiplication des litiges constitue un défi de taille, notamment dans les zones « blanches », où la perte d’un pylône signifierait la disparition totale de la connectivité mobile.
Des impacts concrets pour les zones rurales
Les conséquences de ces tensions sont déjà visibles, particulièrement dans certaines zones rurales où les infrastructures de télécommunication sont limitées. En Ardèche, dans l’Ain, ou encore dans le Gard, des habitants se retrouvent régulièrement privés de réseau suite aux conflits de location. Dans certaines communes du Bas-Rhin, par exemple, la suppression temporaire de pylônes a mené à des défauts de couverture plus ou moins longs, perturbant ainsi le quotidien des usagers.
La situation est d’autant plus problématique que la couverture réseau dans les campagnes françaises est historiquement inégale. Alors que la connectivité 4G et 5G progresse à grande vitesse en zone urbaine, les zones rurales demeurent souvent en retrait. Pour les habitants, la disparition d’un pylône représente une atteinte directe à leur qualité de vie, alors que les solutions alternatives ne sont pas facilement disponibles. En outre, le déplacement ou la reconstruction d’un pylône prend du temps et exige des financements considérables, ce qui aggrave la fracture numérique entre les villes et les campagnes.
Le dirigeant de Cellnex s’inquiète d’ailleurs de l’insuffisance des moyens pour compenser cette « guerre des pylônes ». Selon lui, l’entreprise a déjà dépensé des millions d’euros pour maintenir la couverture des territoires, mais la situation pourrait devenir intenable si les expulsions se poursuivent.
L’hymne ce nos campagnes
Face à cette situation, le gouvernement et les institutions commencent à réagir. La Fédération française des télécoms, consciente des impacts pour la couverture nationale, travaille sur des propositions législatives pour encadrer l’acquisition des baux télécoms. La loi Reen de 2021 et un projet de loi de simplification économique, actuellement en discussion au Parlement, visent à renforcer les obligations des bailleurs en exigeant qu’ils obtiennent des accords avec des opérateurs avant toute installation de pylône. Ces mesures pourraient limiter la spéculation autour des terrains télécoms, freinant ainsi les agissements des acteurs comme Valocîme.
Ces nouvelles régulations n’empêchent pas Valocîme de poursuivre sa stratégie. Frédéric Zimer, qui dénonce des atteintes au droit de propriété, affirme être prêt à porter le sujet jusqu’au Conseil d’État. Si la législation en gestation ne s’applique qu’aux futurs contrats, le problème des milliers de baux déjà acquis par Valocîme reste entier. La fédération des télécoms espère toutefois que cette nouvelle régulation pourra limiter les effets indésirables et offrir un cadre plus sécurisé pour l’ensemble des acteurs.
- L’entreprise Valocîme rachète des baux, causant le déplacement de pylônes et menaçant la couverture 4G dans les zones rurales.
- Le risque de coupure de réseau se fait sentir, notamment dans les « zones blanches », affectant des milliers d’usagers.
- Le gouvernement prépare des lois pour encadrer ces pratiques et limiter les spéculations foncières autour des pylônes télécoms.
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