Les téléphones doivent-ils être exclus des salles de classe ?

Est-ce que la France doit-elle prendre le même chemin que l’Angleterre et bannir les téléphones portables de l’enceinte des collèges ? Cette question refait surface alors que Nicole Belloubet, ministre de l’Éducation nationale, s’est exprimé au micro de France Inter le 7 avril pour l’émission Questions politiques. « L’impact [des] réseaux sociaux pour les jeunes est absolument catastrophique » a-t-elle martelé, suggérant que la « pause numérique » serait un levier d’action pour lutter contre le cyberharcèlement. Néanmoins, cette interdiction est-elle réellement la solution aux maux qu’elle prétend guérir ?

Un impact limité contre le cyberharcèlement

Nous savons déjà que le smartphone n’est pas bénéfique à la concentration, un constat se vérifiant particulièrement chez les plus jeunes. Un questionnaire du média JAM relayé par la fondation d’entreprise Ramsay Santé auprès de 500 jeunes fait état de chiffres plutôt alarmants.

« Les jeunes âgés entre 15 et 25 ans déclarent avoir une relation nocive, voire toxique, avec leur téléphone portable : 38 % se déclarent addicts et 34 % décrivent leur relation comme négative (soit un total de 72 % d’avis critiques) » peut-on lire sur le site de RamsayIls sont également 31 % à constater que « que leur utilisation excessive des écrans perturbait leur sommeil » et 8 % à estimer que « leur utilisation excessive des écrans a un impact direct sur leurs études ».

Toutefois, pour ce qui est du cyberharcèlement mis en avant par Belloubet, elle omet que celui-ci, par définition, peut très bien se poursuivre en dehors des murs du collège. Cette étude parue en 2022 dans la revue Behavioral Sciences révèle qu’en réalité, interdire les smartphones n’est pas la solution miracle au harcèlement. Des mesures plus ciblées sur la prévention plutôt que la prohibition seraient à privilégier.

Le smartphone, l’ennemi de l’apprentissage ?

Une enquête plus récente du PISA (Programme International pour le suivi des acquis des élèves) démontre bien que l’usage du téléphone pendant les cours s’avère être gravement perturbateur pour l’acquisition de connaissances.

« Les élèves qui passent entre 40 et 60 heures par semaine (week-end inclus) sur des appareils numériques en France (14 % des élèves) ont obtenu des résultats inférieurs de 17 points en mathématiques par rapport à ceux qui “ne passent qu’entre 20 et 40 heures” par semaine (week-end inclus) (36 % des élèves) » révèle cette étude. On parle ici de cas extrêmes et d’utilisation réellement excessive.

Toutefois, selon cette même étude, « En France, 30 % des élèves de 15 ans déclarent être distraits par l’utilisation d’appareils numériques (smartphones, sites web, applications) à la plupart ou presque tous les cours de mathématiques (même moyenne dans les pays de l’OCDE) et 27 % déclarent être distraits par d’autres élèves qui en utilisaient pendant les cours (moyenne OCDE : 25 % des élèves) ». Des résultats qui ont de quoi inquiéter.

Interdire les smartphones portables dans les collèges peut apparaître comme une idée attrayante, mais comme toujours, l’approche strictement prohibitionniste comporte des limites évidentes. L’interdit attire, attise les convoitises et ne règle pas le problème à la source. La solution pourrait plutôt résider en une approche plus équilibrée de la question, incluant éventuellement une éducation au bon usage des technologies et des mesures plus sévères contre le cyberharcèlement.

  • Le débat de l’interdiction des portables au collège refait surface, après des déclarations de Nicole Belloubet, ministre de l’Éducation nationale.
  • L’argumentaire déployé s’articulait autour du fait que les portables favorisent le cyberharcèlement.
  • En réalité, interdire les portables n’aurait qu’un effet limité sur le harcèlement. Toutefois, leur usage excessif est bien une entrave au processus d’apprentissage.

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