« La mort de la proximité » : comment les smartphones changent le monde

C’est une recherche anthropologique d’ampleur qui mérite toute notre attention. Des chercheurs de l’University Collège de Londres ont mené un étude sur les smartphones et leur impact dans neuf pays d’Afrique, d’Asie, d’Europe et d’Amérique du Sud. Une constatation majeure s’impose et elle ne surprendra personne : ces téléphones sont devenus centraux dans la vie de millions de personnes, à tel point qu’ils sont perçus comme « le lieu » sur lequel ils s’expriment le plus.

De nombreux exemples d’appropriation positive des smartphones

Cité par Techxplore, Daniel Miller, qui a dirigé ce travail universitaire passionnant, explique :

Nous montrons également comment le smartphone n’est plus seulement un appareil que nous utilisons, il est devenu le lieu où nous vivons. Le revers de la médaille pour les relations humaines est qu’à tout moment (…) une personne avec qui nous sommes peut tout simplement disparaître sur son smartphone. Ce comportement, et la frustration, la déception ou même l’offense qu’il peut causer, est ce que nous appelons la mort de la proximité. Nous apprenons à vivre avec le risque que, même lorsque nous sommes physiquement ensemble, nous puissions être socialement, émotionnellement ou professionnellement seuls.

Cet effet négatif est toutefois contrebalancé par une vaste gamme de comportements positifs estiment les scientifiques et notamment pour les personnes âgées qu’ils ont particulièrement observé. Daniel Miller précise : « Dans le même temps, le smartphone nous aide à créer et recréer une vaste gamme de comportements utiles, du rétablissement des relations entre familles élargies à la création de nouveaux espaces pour les soins de santé et le débat politique. »

L’étude cite d’ailleurs de très nombreux exemples d’appropriation créatrices des smartphones. Pour n’en citer que trois, on retient ainsi qu’en Ouganda, les transferts d’argent par téléphonie mobile permettent aux gens d’envoyer des fonds chez eux à des parents âgés vivant dans des zones rurales.

De même, au Cameroun, les auteurs ont pu constater que la classe moyenne s’aide des smartphones pour prendre part au débat politique. Enfin, en Irlande, les retraités ont pris pour habitude de s’adonner à de nombreuses activités sur leurs téléphones, ce qui contribue à égayer cette période de la vie de plus en plus longue.